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Art et Culture Publié le mardi 24 décembre 2013 | Nord-Sud

Gouvernance éditoriale, propagande, évolution technologique… : Sy Savané dévoile les plaies des médias de service public

Le président de la Haute autorité de la communication audiovisuelle (Haca) a animé, mercredi dernier, une conférence publique à la maison de la télé à Cocody, sur le thème : «Médias de service public : la marque à renforcer». Ibrahim Sy Savané a, dans un langage franc, relevé certaines faiblesses des télévisions nationales africaines.


Il ne pouvait pas aborder la question de la marque à renforcer au niveau des médias de service public sans s’attarder sur les faiblesses de ces structures. Invité par la Radiodiffusion télévision ivoirienne (Rti) pour animer une conférence publique, mercredi dernier, le président de la Haute autorité de la communication audiovisuelle (Haca), Ibrahim Sy Savané, s’est appesanti sur les aléas des télévisions publiques africaines : mauvaise gouvernance éditoriale et financière des chaînes, utilisation univoque de la télévision publique à des fins de propagande, forte attente des populations qui disposent d’offres exogènes, immobilisme technique et technologique etc. Toutes choses qui trouvent leurs racines dans leur constitution.

Quelles télévisions nationales…

Selon l’ex-ministre de la Communication, «l’on a parfois affaire à des offices considérés comme des services administratifs; des établissements publics administratifs aux marges d’action réduites». De ce fait, ils sont «contrariés en permanence par les démangeaisons interventionnistes de l’Etat». Au plan financier, a-t-il relevé, certaines chaînes publiques disposent de budgets annuels significatifs atteignant parfois 17 milliards FCFA. La Côte d’Ivoire occupe une position de choix. «Si l’on veut aller plus loin, il faudra distinguer aussi entre audiovisuel public et audiovisuel d’Etat. Pendant que nous y sommes, il faudra réfléchir également à la meilleure façon de transformer l’audiovisuel public en audiovisuel du public», a-t-il poursuivi. Car, estime le président de la Haca, les conditions sont indépendantes de la question des moyens, des niveaux d’acquisitions technologiques.

…Face à la concurrence

Le regard que jette M. Sy Savané sur les chaînes nationales qui doivent affronter la concurrence, qui ne fait toujours pas peur, laisse planer des doutes sur l’aptitude des chaînes publiques à faire face à l’éclatement de l’espace audiovisuel. «Il est difficile de qualifier autrement la méfiance et la défiance qui frappent les télévisions publiques africaines. Cela se manifeste de plusieurs façons: Un refus catégorique ou ironique d’accorder la moindre importance à certains types d’informations, dès lors qu’elles sont véhiculées par la télévision publique. Cela se traduit donc par un boycott plus ou moins passif des programmes d’informations», analyse-t-il. Alors que certains magazines, le sport, les télénovelas et autres séries, suscitent un réel engouement.

Opportunité de libéraliser

A niveau, au plan technique ou non, les chaînes publiques devront faire face à la concurrence qui est imminente. «La libéralisation est indispensable pour de nombreuses raisons : la démocratie, le pluralisme culturel, les raisons économiques etc.», déclare-t-il. Toutefois, il se dit certain que le processus «est une seconde chance, un second souffle pour la télévision publique» à condition d’avoir «une longue vision qui est tout le contraire de l'immobilisme».

Les ajustements à faire

Quelles que soient les modalités utilisées, l’avènement de chaînes privées induit à la fois un changement de paradigme et une remise en cause du modèle global des télévisions publiques. «Nous sommes engagés dans des processus de libéralisation audiovisuelle qui ne doivent pas consister à détricoter l’audiovisuel public», précise-t-il. Selon le patron de la Haca, toutes les chaînes sont déjà confrontées aux bouquets, aux paraboles, aux vidéoclubs. «La concurrence est donc déjà là. En situation de monopole, la marque n'existe pas vraiment. Seule la concurrence lui donne un sens», reconnaît-il.

La connaissance
du public et ses attentes

Le gendarme de l’audiovisuel ivoirien pense que «si les entités publiques ne parviennent pas à appréhender globalement leur public, avant de les segmenter, elles ne pourront jamais ajuster leurs offres et développer la politique de marque à laquelle elles voudraient aspirer». Parmi les raisons qui militent en faveur d’une véritable politique de diversification, il évoque la nécessité pour l’audiovisuel public «d’éviter la marginalisation qui le guette s’il se tient à l’écart du mouvement de mutations techniques». Et même ne pas ignorer les réseaux sociaux et leur poids tant au plan social qu’économique.

Sanou A.
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