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Société Publié le samedi 28 septembre 2019 |

Colloque international de bioéthique : le discours du président de l’université, Lazare Poamé.

© Par DR
Colloque international de bioéthique
L’université Alassane Ouattara de Bouaké a abrité les 26 et 27 septembre 2019, un colloque international de Bioéthique en collaboration avec la chaire Unesco et sous la présidence du ministère de l`enseignement supérieur. Le colloque a eu lieu autour du thème « hommage à Gilbert Hottois : la bioéthique et le transhumanisme au XXIe siècle »
Monsieur le Représentant du Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique,



Monsieur le Maire,



Madame et Messieurs les Doyens des UFR,

Mesdames et Messieurs les Directeurs de Centres,

Mesdames et Messieurs les Chefs de services,

Mesdames et Messieurs les conférenciers,

Mesdames et Messieurs les Enseignants-Chercheurs,

Chers collaborateurs du personnel administratif et technique,

Chers étudiants,

Chers amis de la presse,



Mesdames et Messieurs,

C’est avec une joie entachée de tristesse que nous vous souhaitons la bienvenue à l’Université Alassane Ouattara. En effet, aujourd’hui, s’ouvre à l’UAO, le colloque international en hommage à Gilbert Hottois, l’un des plus grands philosophes bioéthiciens de notre temps, décédé le 16 mars 2019.

Le 15 juin 2019, lors de l’hommage rendu au Professeur Koménan Aka Landry, nous affirmions dans cette même salle : «Quand les hommages pleuvent, c’est que le fleuve héraclitéen est en crue. Et ce serait cruel de se complaire dans cette vieille tradition rendant les hommages à titre posthume ».

Si nous le savions !

Initialement, nous avions opté pour un colloque (adossé au Programme thématique de recherche du CAMES « Gouvernance et développement ») sur Habermas et Hottois, les deux grandes figures de la philosophie contemporaine et de la bioéthique, mondialement connues au point d’avoir fait l’objet de plusieurs Thèses de Doctorat. Qui plus est, leurs œuvres, qui ont rejoint les grands classiques, s’enseignent aujourd’hui dans les grandes universités.

Si nous le savions!

La grande énigme, qui nous rappelle de façon intempestive notre finitude anthropologique à laquelle semble désespérément résister la puissance gnoséologique qui tente de faire de nous des immortels, s’est signalée au moment où nous attendions le Professeur Gilbert Hottois à Bouaké, 23 ans après son premier passage en qualité de professeur missionnaire à l’Université de Bouaké, qui abrite aujourd’hui la Chaire UNESCO de bioéthique.

Réduit à jamais au silence absolu, Hottois, qui nous avait confirmé sa participation à ce colloque, ne se fera plus entendre. La voix de celui par qui nous avons contracté le virus bioéthicien est désormais inaudible, sauf à espérer une quelconque prosopopée. Mais fort heureusement, la voie qu’il a tracée est inaltérable. C’est la voie royale du savoir encyclopédique, au sens de en kyclos paideia, c’est-à-dire l’art de parcourir le cercle du savoir humain.

De fait, Hottois avait pédagogiquement et admirablement parcouru le cercle de la connaissance psychanalysée ; ce qui lui valut les titres de philosophe du langage, philosophe de la technique et de philosophe bioéthicien.

Son sens aigu de la reliance sans complaisance est perceptible dans les interstices du mouvement de sa pensée qui part de la métaphilosophie du langage (secondarité adlinguistique) à la bioéthique, dont la première encyclopédie en langue française a été publiée en 1993 sous le titre : Les mots de la bioéthique.

Qu’est-ce que la bioéthique ?

La bioéthique, comme nous le précisions dans notre cours-conférence, donné à l’Académie royale de Belgique, est « de prime abord définie sur la base d’un recours naïf à l’étymologie qui en fait une éthique de la vie (bio-éthique) ». La définition, plus précise que nous en donne G. Hottois, pose la bioéthique comme un ensemble de recherches, de discours pratiques et de pratiques ’’généralement pluridisciplinaires et pluralistes, ayant pour objet de clarifier et, si possible de résoudre des questions à portée éthique suscitées par la R&D biomédicale et biotechnologique » (G. Hottois, Qu’est-ce que la bioéthique ? 2004).

Encyclopédiste dans l’âme, Hottois s’est toujours penché sur les grands problèmes de l’humanité et ses écrits se sont souvent soldés par la publication d’une encyclopédie dont la dernière en date (2015) est l’Encyclopédie du transhumanisme et du posthumanisme.

Le transhumanisme, thématique principale de ce colloque, perçue comme amélioration / augmentation des capacités humaines dont la figure de proue est la robotique, constituait pour le philosophe bioéthicien une question majeure. Que l’on en juge à travers ses propos :

Qu’il me soit permis de clore ce bref essai par un épilogue plus personnel. Mon intérêt pour les interrogations qui portent le trans/ posthumanisme est ancien. J’ai utilisé les termes « Transhumain, posthumain, abhumain » dès le milieu des années 1970 dans le contexte de ma critique de la philosophie de l’époque incapable de prendre en compte ces questions que je jugeais essentielles (G. H).



Ces questions sont d’autant plus essentielles que ce qui se joue dans le transhumanisme, ce n’est ni plus ni moins que l’avenir de l’humanité.



C’est pourquoi, pour prétendre aujourd’hui sauver l’humanité de l’ivresse transhumaniste, il faut penser le transhumanisme, c’est-à-dire, passer au laminoir de la pensée pensante ce qui, dans le concept, se présente comme transgression, comme fragmentation de l’humain. En effet, jusqu’où ira le besoin de transcender l’humain proprement humain?

Jusqu’où ira la transgression de notre originelle humaine condition? Le transhumanisme s’apparenterait-il à une boîte de Pandore ou une boîte à bijoux anthropocentrique ?

« Le plus bel hommage que nous puissions rendre à un auteur, affirmaient Yale Review et Charles Morgan, n’est pas de rester attachés à la lecture de ses pages, mais plutôt de cesser inconsciemment de lire, de reposer le livre, de le méditer et de voir, au-delà de ses intentions avec des yeux neufs ».

C’est l’espoir que nous nourrissons à travers cet hommage mérité que la communauté scientifique internationale s’apprête à rendre à Gilbert Hottois.

C’est, à présent, le lieu pour nous de remercier très sincèrement Monsieur le Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, le Dr Albert Toikeusse MABRI, d’avoir accepté de présider ce colloque, nous donnant ainsi la preuve de son intérêt pour la Bioéthique qu’appelle sa double posture de médecin et de garant de la recherche scientifique en Côte d’Ivoire.

Nous tenons également à remercier le représentant de Monsieur le Ministre, le Dr Simplice Dion, Directeur de Cabinet Adjoint et Maître de Conférences en philosophie, pour sa présence naturelle à nos côtés et la qualité de la collaboration instituée entre le Ministère et les Universités.

Comment ne pas remercier Monsieur le Maire Nicolas Djibo dont le soutien ne nous a jamais fait défaut ?

Nous adressons des remerciements tout particuliers au Professeur Jean-Noël MISSA de l’Université Libre de Bruxelles, philosophe et médecin, co-auteur des Encyclopédies produites par Gilbert Hottois, pour le cachet honorifique qu’il donne à ce colloque et pour sa contribution inestimable aux savoirs bioéthiques. Merci, cher collègue, d’avoir bravé toutes les difficultés auxquelles vous avez été confronté pour être présent à nos côtés.

Nous n’oublions pas tous les conférenciers venus de la sous-région pour apporter leur contribution à cet hommage. Nous pensons au Professeur Marcel Nguimbi, de l’Université Marien Ngouabi du Congo, au Professeur Savadogo Mahamadé, de l’Université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou, au Professeur André Liboire, de l’Université de Dschang du Cameroun, aux Docteurs Komi Kouvon et Auguste Nsonsissa, tous deux Maîtres de Conférences, qui nous viennent respectivement de l’Université de Lomé et Marien Ngouabi du Congo.

Nos remerciements également à tous ceux qui ont effectué le déplacement à Bouaké ainsi qu’à tous les membres du Comité d’organisation que nous tenons à féliciter chaleureusement pour la qualité de l’organisation.

Nos remerciements vont enfin aux étudiants pour leur mobilisation exemplaire et leur intérêt pour la bioéthique qu’atteste cet amphithéâtre archicomble.

G. Hottois aurait dû être vivant et présent ici pour se réjouir de la bonne fortune de ses écrits ou répondre aux éventuelles critiques qui seront exprimées par les uns et les autres lors de ce colloque. Mais hélas ! Hélas !

Mesdames et Messieurs,

Qu’il nous soit permis de terminer notre propos sur ces mots de G. Hottois, prononcés en décembre 1996 à l’UAO, ex-université de Bouaké :

…il ne s’agit plus de protéger l’individu hic et nunc, mais d’organiser carrément l’avenir de l’humanité (de la vie même) dans un sens calqué sur certaines idées, connaissances, valeurs ou utopies du présent. De quel droit pourrions-nous aujourd’hui décider de cet avenir et pour cet avenir? (G. Hottois, La philosophie des technosciences, Textes rassemblés par L. Poamé, 1997).



Nous vous remercions.

Prof. Lazare POAMÉ
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