L’habit ne fait pas le moine, dit l’adage. Cette maxime n’a pas servi de guide à dame Brou N’goran qui vend du vivrier au marché de Gesco (Yopougon). Avec ses maigres ressources financières issues de ce commerce, elle pensait croiser celui qui viendrait mettre un terme à sa souffrance. Elle est veuve et mère de cinq gosses. « Mon fils aîné est titulaire d’un Bepc. Cela fait cinq ans qu’il n’a pas encore trouvé du travail. Toutes les charges de la famille se reposent sur mes épaules », se confie-t-elle à Kouadio Christ. Comme par hasard celui-ci est son voisin de route lors de son voyage à Soubré. C’est là-bas qu’elle s’approvisionne en produits vivriers (bananes, choux, aubergines, etc). «On revenait de voyage. Dans la conversation, il m’a affirmé qu’il était un gendarme. Il n’avait pas de documents pour attester sa qualité. Cependant, il était assez persuasif dans les échanges. Je lui ai exposé le problème de mon fils qui voulait présenter le concours d’entrée à l’école de la gendarmerie. Selon lui, il pouvait nous aider dans ce sens. Il a soutenu qu’il avait des relations solides pour réaliser mon désir », avance Mme Brou. Nous sommes en novembre 2009. En véritable vendeur d’illusions, Christ ne cesse de faire son « atalakou » (fanfaronnades) comme on le dit dans le milieu des disc-jockeys. Il se met en valeur en racontant des histoires à celle qu’il appelle « ma tantie ». Pour convaincre la pauvre dame, Christ se procure un treillis pour prendre l’aspect d’un pseudo-gendarme. «On habitait le même quartier. La familiarité aidant il a insisté sur le fait qu’il pouvait aider mon fils à rentrer à la gendarmerie. Selon lui, je devais lui remettre 500.000 Fcfa », souligne la commerçante de vivrier qui se plie en donnant la moitié du montant demandé par naïveté ou ignorance ! Tout compte fait, Mme Brou se fait prendre dans le piège tendu par l’imposteur. Le reste, poursuit-elle, devait être versé après l’admission au concours. « J’ai effectivement reçu les 250.000Fcfa. Je devais mouiller la barbe de mes supérieurs hiérarchiques. Moi, je voulais tout simplement l’aider parce que c’est une tantie du quartier », se persuade le malfrat qui file à l’anglaise avec les 250.000 Fcfa. Durant quatre mois, il court les rues de la commune de Yopougon. Entre-temps, Mme Brou porte plainte pour escroquerie au commissariat de police du 23ème arrondissement, à Andokoï. Les hommes du commissaire Touré Albert Kouacou ouvrent une enquête qui démasque le faux gendarme le 3 février. Mais, galopin nie l’accusation. Il prétend qu’il avait remis un lot de bazins à la plaignante pour vendre. Et que celle-ci aurait détourné l’argent de la vente des pagnes à son profit. Une déclaration réfutée par Mme Brou. Elle soutient plutôt que c’est Christ qui l’a grugée. Présenté hier à la barre du tribunal des flagrants délits de Yopougon, le prévenu plaide non coupable. Il développe des arguments farfelus pour semer le tribunal. La plaignante s’est constituée partie civile. Son témoignage à la barre confond l’accusé. Et le réquisitoire du parquet met fin aux jérémiades du faussaire. Il est incarcéré au pénitencier de Yopougon pour 12 mois fermes assortis d’une amende de 50.000 Fcfa. A la fin de sa punition, Christ doit verser la somme de 250.000 Fcfa à la victime.
Ouattara Moussa
Ouattara Moussa