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Politique Publié le mardi 29 juin 2010 | Nord-Sud

Témoignages de ...

Kamagaté Ibrahima, Le Patriote:“Nous ne savions que faire”

« L'attentat a été un moment difficile. Il s'est déroulé à l'occasion du redéploiement de l'administration judiciaire sur toute l'étendue du territoire national. Nous, jeunes journalistes, étions fiers d'apporter notre pierre à l'édifice. Dans l'avion, une détonation a dérouté tout le monde. Nous ne savions que faire ; des corps gisaient dans la carlingue. Mais après nous avons été secourus et conduits au Qg des Forces nouvelles, d'où nous avons joint nos parents et rédactions respectifs. Puis, nous avons été logés à une heure tardive. Le lendemain, nous avons quitté Bouaké. La primature nous a orientés vers la PISAM (Polyclinique Sainte Anne-Marie) où un psychologue s'est occupé de nous. Nous avions mis sur pied une structure dont je suis le président. Cette structure a rencontré le ministre de la Communication, Ibrahim Sy Savané, qui nous a sensibilisés à reprendre confiance. Nous sommes déterminés à ne pas passer sous silence cette étape de notre existence ».

Jeanne-Françoise Coulibaly, Cicg:“J'ai vu des corps sans tête”

«Tout s'est tellement vite passé que je retiens que j'ai été blessée au coin de l'œil gauche. Bien avant le décollage, un garde du corps m'a demandé par deux fois de me déplacer. Touré Madia, photographe au cabinet du Premier ministre, m'a aussi exhortée à le faire. Je m'étais assise juste après le salon VIP, sur des sièges réservés aux agents de sécurité. Après quarante minutes de vol, nous avons entendu un grand bruit, lors de l'atterrissage. J'ai pensé que c'était un pneu qui avait éclaté. On a paniqué. Et les secondes qui ont suivi, le téléviseur a explosé, la fumée a envahi la cabine. C'est seulement quand des voix nous ont demandé de nous coucher parce que nous étions attaqués que j'ai tout compris. Je me suis exécutée et je me suis mise à prier. Une autre voix nous a intimé l'ordre de sortir. En sortant, j'ai vu à ma droite des morceaux de chair humaine et deux hommes, sans têtes, couverts de sang, dans la cabine VIP. C'était horrible ! Là, prise de peur, je suis tombée d'horreur. Une fois sur le tarmac, quelqu'un nous a orientés vers un car, qui nous a conduits au secrétariat général. Là-bas aussi, c'était la même panique. Nous nous sommes cachés dans une chambre d'où nous avons passé des coups de fils. Quand le calme est revenu, le ministre Konaté Sidiki a fait recenser les blessés qui ont été conduits à Toumbokro. J'ai été très traumatisée, surtout que j'étais enceinte de six mois ».

Yapi Assa Apollinaire, Cicg :“L'objet entre mes jambes était un obus”

Après l'atterrissage de l'avion, au moment où le pilote allait immobiliser l'appareil, nous avons entendu un bruit. D'emblée, nous avions pensé à quelque chose qui a explosé dans l'avion, peut-être un tuyau. Puis, on entend une autre détonation. A ce moment, je perds connaissance quelques secondes, à cause des éclats que j'ai reçus. Quand je repris mes esprits, je me rends compte qu'il y a quelque chose entre mes jambes, qui dégage de la fumée. Mon voisin me demande alors de voir de quoi il s'agit. Tant bien que mal, je me courbe pour regarder, groggy et sans mes lunettes. En même temps, la fumée a commencé à envahir l'avion. Je crois que c'est à ce moment que tout le monde s'est rendu compte qu'il s'agissait plutôt d'une attaque.
C'est après ça que chacun a essayé de sortir de l'avion. Il fallait traverser le salon où se trouvait le Premier ministre. C'est ainsi que nous nous sommes rendus compte de tout le massacre qu'il y a eu. Le Premier ministre avait déjà été évacué, mais on a vu des corps qui étaient là et qu'on évacuait. J'ai été évacué à l'hôpital où j'ai trouvé sur place, Soul to Soul qui était grièvement touchés et d'autres blessés aussi. J'ai reçu les premiers soins et Soul to Soul était très agité. Il tenait à savoir le sort du Premier ministre avant de se laisser soigner, alors qu'il avait des éclats de verre un peu partout. Mais, il n'était pas tout à fait conscient. Il criait. J'ai essayé de le rassurer. J'ai demandé à partir de l'hôpital. Ils m'ont fait les premiers pansements et je suis allé au secrétariat général qui n'est pas loin de l'hôpital de Bouaké et là j'ai vu que le Premier ministre était à son bureau. Nous avons échangé quelques mots et je lui ai fait part des inquiétudes de Soul à son sujet. Il l'a alors appelé pour le rassurer.

Propos recueillis par Bidi Ignace
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