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Société Publié le vendredi 25 mai 2012 | Le Mandat

Enquête express / Djosseurs de namans : De la débauche d’énergie pour si peu

-Une activité avilissante

Ils sont nombreux les jeunes qui, chaque matin, sillonnent les différentes communes d’Abidjan pour s’adonner à des activités diverses génératrices de revenus. Nous avons rencontré certains d’entre eux au Plateau. Notamment des ‘’Djosseurs des namans’’ (gardiens de véhicules),qui aident certaines personnes à garer leurs voitures sur les différents parkings et autres espaces aménagés, moyennant quelques sous.

Déscolarisés pour la plupart et désœuvrés, c’est un métier à plein temps qui les aide plus ou moins à se prendre en charge. De la Rue du Commerce en passant par la Rue des Banques pour arriver à la Cité administrative de la commune du Plateau, ils se sont créés des espaces qu’ils gèrent. Ces jeunes investissent quotidiennement les places de stationnement en se transformant en propriétaires. Ainsi, sous la pluie, sous le soleil, ils sont présents sur les artères, guettant avec vigilance tous les véhicules qui passent. Au moindre coup de frein ou signe de ralentissement, ils accourent en faisant de grands signes pour essayer de guider les potentiels clients. Vous ne pouvez donc pas les rater, car eux ne vous ratent pas, même si vous feignez de les ignorer ou de fuir leur regard, leur provocation et leur insistance vous rattrapent.

Un travail avilissant…

Lundi 14 mai, 7h05 mn. Nous arpentons la Rue du Commerce jusqu’à l’angle de la Caisse générale des retraités et agents de l’Etat (CGRAE). Ils sont à tous les endroits où se trouvent ces espaces propices pour stationner des véhicules. Considérés comme des mendiants, ils subissent parfois la mauvaise humeur des propriétaires. Ces jeunes gardiens de véhicules sont parfois sujets à des humiliations en forme d’injures et de railleries. Très souvent, après avoir joué les surveillants, ils sont ignorés par les chauffeurs qui démarrent en trombe sans un seul mot de reconnaissance. «Il y a des propriétaires de mauvaise foi qui refusent de nous donner de l’argent », a déclaré Niae Roméo, un ancien agent de la police municipale licencié après la crise postélectorale, qui s’est reconverti en ‘’Djosseur de namans’’. Ces collègues et lui évoquent le problème de petite monnaie, une des difficultés qu’ils rencontrent et qui leur fait perdre souvent de l’argent. Il leur arrive aussi d’avoir des accrochages avec certaines personnes qui refusent de les écouter et de se soumettre à leurs recommandations pour une meilleure fluidité de la circulation. Parce qu’ils sont parfois vus comme une menace sécuritaire et une gêne morale. Selon Roméo, notre interlocuteur, lorsqu’une situation pareille se présente, ils les laissent agir à leur guise. Et lorsque la police municipale les surprend sur les trottoirs et des espaces de stationnement interdits, elle leur pose des sabots et les contraint à débourser 10.000 FCFA à la mairie.

… au revenu maigre…

100 FCFA. C’est la paie que reçoivent les ‘’Djosseurs des namans’’ après avoir aidé un chauffeur à garer sa voiture, nous laisse entendre Niae Roméo qui soutient qu’aucune somme n’est imposée. Les personnes que nous aidons à garer leur voiture font parler leur cœur, selon lui. En somme, ils gagnent entre 2000 ou 3000 FCFA par jour, à l’exception des vendredis où les gains s’élèvent souvent à 5.000 FCFA. Cet argent leur sert pour la nourriture quotidienne et pour les autres dépenses. Une somme qui, selon ce jeune homme, ne lui permet pas de se prendre en charge, surtout qu’il doit en soustraire le pot de vin des divers intervenants de la chaine, à commencer par les agents municipaux, seule condition pour que leur activité se pérennise. « Je n’arrive pas à joindre les deux bouts », avoue Niae Roméo. Un autre ‘’Djosseur de namans’’, qui a requis l’anonymat, soutient pour sa part : « les temps sont durs ; je ne suis pas allé à l’école et je n’ai pas de qualification donc, pour ne pas voler, je viens me débrouiller ici ». Pour lui, leur calvaire vient du manque d’organisation en leur sein. « Nous avons essayé de nous organiser en association mais n’avons pas pu parce qu’il y avait trop de pagaille, donc nous avons dû abandonner le projet ». En plus, la présence des agents de la police municipale et des vigiles, qui parfois les rançonnent, n’arrange en rien une situation déjà précaire et difficile, même si leur présence dissuade les voleurs d’enjoliveurs, de postes radio, d’essuie-glaces, de rétroviseurs...

… mais qui aide parfois.

Un peu plus loin dans le même secteur, un autre jeune homme attire notre attention. Assis sur le capot de la voiture d’un de ses « vieux père », comme il le dit lui-même, Sébastien Zébré a abandonné l’école depuis la classe de 3ème. Ce jeune homme, qui pratique cette activité depuis 1995, nous a confié que la commune du Plateau n’est la chasse gardée de personne. Selon lui, leur corporation a versé de l’argent à la mairie pendant des années, mais à la suite d’une incompréhension dont il ignore les raisons, les versements ont été arrêtés. Pour ce faire, la mairie a mandaté des agents pour traquer les ‘’Djosseurs de namans’’ qui s’occupent des parkings. Sébastien exerce cette activité de ‘’Djosseurs de namans’’ et y trouve son compte. Il est père de famille, et s’en sort avec l’argent qu’il gagne par jour. « Mon activité me rapporte suffisamment. Et avec cet agent j’arrive à nourrir ma petite famille et à subvenir aux besoins de mes enfants », a-t-il dit.

MARIE PAULE KOFFI
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